L’amour, c’est surcoté : alerte beau film !

Juliette Follin 05/05/2025

L’amour, c’est surcoté est le premier film de Mourad Winter, adapté de son roman éponyme. Dans ce long-métrage, les acteurs Laura Felpin, Hakim Jemili et Benjamin Tranié traduisent parfaitement la sensibilité du punchlineur littéraire préféré du stand-up.

Mourad Winter est un génie. On m’a glissé cette information lorsqu’il arpentait les scènes de stand-up. Pourtant, de son propre aveu, monter sur scène n’était pas son meilleur terrain de jeu.

Comme vous le savez peut-être, Mourad a changé son fusil d’épaule et écrit deux romans. L’amour, c’est surcoté, le premier, a imposé un phrasé unique en son genre, une patte stylistique alignée au potentiel comique du propos. Ensuite, Les meufs, c’est des mecs bien a confirmé ce qu’on savait déjà, en haussant même le niveau du jeu.

L’adaptation de L’amour, c’est surcoté, le livre de Mourad Winter, confirme son génie artistique

Passer de la plume à la caméra renforce encore le niveau de difficulté. En effet, les adaptations, c’est toujours casse gueule. De prime abord, j’avais quelques appréhensions en voyant Hakim Jemili interpréter le rôle principal du film L’amour c’est surcoté. Pas par manque de talent, mais parce que le cinéma français a le défaut d’essorer les mêmes acteurs, un long métrage après l’autre.

Voir les mêmes têtes interpréter une ribambelle de personnages, c’est ne plus trop savoir à qui on a affaire. La soif de découverte donne aussi envie de voir de nouveaux contours interpréter ce qu’on a aimé, surtout en format papier.

Or Hakim Jemili interprète ce rôle à la perfection. J’ai vite oublié le stand-upper qui, à ses débuts, se contentait de « Super » en guise de punchlines. Une fois cette seule appréhension levée, j’ai pu apprécier l‘œuvre.

Laura Felpin et Benjamin Tranié, comme Hakim Jemili, sont aujourd’hui bankable pour de très bonnes raisons. Leur interprétation de personnages dans leurs spectacles respectifs les distingue de la masse. Au cinéma, j’ignorais ce que ça allait donner. Au terme du film, j’ai complètement baissé ma garde et pris une claque. Laura et Benjamin portent le film, peut-être même davantage que la belle alchimie Felpin-Jemili.

Un récit poignant, amené avec autant de douceur que de brio

En effet, Mourad Winter nous a pondu un scénario flambant neuf pour l’occasion. Il reprend les névroses de Wourad et les distille aussi dans la provoc’ des répliques de Benjamin Tranié… Mais l’histoire est inédite et a pour toile de fond un deuil mal digéré. Elle embarque lentement mais sûrement, dans un tourbillon émotionnel amené avec une douceur rare. C’est beau sans jamais en faire trop, dans l’air du temps sans gloser sur l’intérêt de la thérapie… En somme, cela chasse les écueils classiques des comédies dramatiques, surtout celles à dimension sociale.

De ce film, je ne retiens qu’un bémol : le rôle si caricatural d’Alexandra Roth. Mal écrit, joué comme dans la sitcom Terminal, il offre une représentation de la nymphomane au réalisme inexistant, qui tranche avec la subtilité vue par ailleurs. Sa paire de mioches comme l’énumération de son nombre de partenaires sexuels faisaient de la peine à voir. Alexandra Roth a beau utiliser ce registre dans son stand-up, on adorerait la voir explorer d’autres horizons.

Néanmoins, ne laissez pas cette poignée de minutes malaisante entraver le bonheur de découvrir ce bijou de cinéma qui joue sur une multitude de tableaux magnifiques.

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