Clown triste : quand l’humour a la gueule de bois

Juliette Follin 29/07/2017

Face à l’humour, la presse devient folle, vous ne trouvez pas ? D’un côté, elle s’hystérise dès qu’elle découvre un nouveau poulain de l’humour sans avoir l’air d’y porter vraiment attention. Fais un papier et prends ta pause déj’, qu’ils disaient. Et de l’autre, elle tente de faire un buzz avec une interview à la sauce c’était mieux avant, rendez-nous Coluche. Mais qu’en est-il de l’état actuel de l’humour ?

Trop d’humoristes : à quand une régulation du rire ?

Samedi dernier, c’est l’Obs qui dégomme en premier avec une citation de Régis Mailhot, « Le comique est partout, l’humour nulle part ». Dans cette interview, il est question d’uniformisation d’une masse humaine d’humoristes qui arriverait voler tous les micros du rayon high-tech de la Fnac pour dire ou faire la même chose. Comme si Donald Trump avait réussi à faire rayonner l’Amérique en happant l’originalité des petits humoristes français qui montent.

Mais pourquoi pas : après tout, c’est génial de confronter des points de vue, on ne peut pas toujours être d’accord avec tout. Bon, dans le papier de l’Obs, on y lit que Pierre Palmade est un génie. Aucun jugement de valeur là-dessus, simplement un trampoline idéal pour rebondir sur un article paru un mois plus tôt dans le Figaro. On y apprend que Pierre Palmade trouve… qu’il y a trop d’humoristes ! Je ne sais pas s’il y a trop d’humoristes, mais pour citer Adrien Arnoux, le stand-up c’est vachement mieux en France qu’en Corée du Nord. Allez le voir en plateau pour comprendre, on ne dévoilera pas tout.

Humour et bonne humeur : pas toujours facile...

L’humour en mode écrémage

Comme on passe un bon moment sur le web, on continue de surfer et on tombe sur un gros rocher qui casse la planche. Et là, c’est François Rollin qui arrête de fréquenter des planches, comme le dépeint un blog humour du Monde. La nouvelle est en train de ruisseler à mesure que les rédactions la remâchent. On va essayer de ne pas oublier cette information-là.

François Rollin, je l’ai vu chez Radio Nova en novembre et puis je l’ai vu sur scène le mois suivant. Tout le monde adore ce qu’il fait mais il ne se retrouve pas assez bankable pour poursuivre. C’est comme un taulier qu’on verrait de temps en temps : on l’identifie au loin, on se dit que c’est cet oncle qu’on devrait aller voir plus souvent et puis on oublie. Et enfin, quand on finit par prendre le temps, on jubile. Ceux qui ont eu la chance de le voir sur scène ou ailleurs mesurent l’opportunité qu’ils ont su saisir.

“Il n’y a pas de place pour le type de travail que je fais dans l’économie de la culture”, affirme-t-il. — La Croix

Alors, y a-t-il toujours trop d’humoristes ? Vous me direz, c’est la destruction créatrice schumpéterienne qui est En marche, fallait pas s’étonner. On n’ira pas plus loin, apparemment, il y a trop d’éditorialistes politiques sur les ondes.

La responsabilité du public

Au final, le public doit reprendre le pouvoir. Creuser. Ne pas attendre que des algorithmes proposent du tout cuit, une valeur sûre convenue ou une invitation gratuite sur WeClap ou SoFizz histoire de remplir un peu plus les salles et de prendre un petit risque. Moyennant un selfie bourré de mots-dièse en contrepartie de cette gratuité. La qualité se mérite peut-être. Si le concept de l’âme sœur prend cher avec Tinder et consorts, il y a sûrement un humoriste qui vous correspond quelque part. Cherchez bien et n’écoutez pas (trop) les conservateurs du rire.

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