Je n’aurai jamais d’opinion sur Florian Nardone

Juliette Follin 13/03/2024

En deux ans sur les planches, Florian Nardone a fini par me convaincre de me bouger pour voir son spectacle. J’avais prévu d’y aller, mais quelque chose me retenait. Date réservée, mais je n’envoyais toujours aucun message. Lui a finalement pris les devants, comme s’il avait deviné mes tourments. Comment transformer un silence en un oui, légalement bien sûr. Puis il a été malade. Report deux semaines plus tard. Puis cette annonce : le spectacle est fini. Clown triste, comme François Rollin en son temps.

Florian Nardone, un artiste engagé, clivant… mais encore ?

Mais pourquoi tant de réserve ? L’artiste est clivant, il se fait autant insulter qu’encenser. Surtout, sa visibilité venait des réseaux. Cela dit, il travaillait avec Camille Lavabre, une vraie artiste de scène. J’imagine qu’il l’est devenu à son tour à un moment ou à un autre.

Validé par certaines féministes, honni par d’autres — soit. En jouant à la Nouvelle Seine, en reprenant une typo similaire à Libération sur sa dernière affiche, il posait le terrain. Ce sera de l’humour engagé. Mais qui parle à qui, une communauté, des gens qui préfèrent Insta au théâtre ? Trop de doutes, la peur de voir une conférence d’un type qui aurait dû faire de la politique si ce milieu n’était pas miné… N’en jetez plus !

Hors des circuits traditionnels

Les dés sont jetés, donc. Voilà un artiste que je ne verrai jamais. Trop connu pour que je prenne la peine de venir, mais en quête de légitimité sur les circuits traditionnels… Les plateaux d’humour bon enfant, les comedy clubs aux programmations publiques… Son arrêt, visible par de nombreuses personnalités du gratin, éclipserait presque tous ceux qui jettent l’éponge sans un au revoir. Courageux, égoïste ? Sans opinion.

« Je suis monté sur scène pour faire chier des gens qui avaient collé des affiches pour attaquer Violente Viande (…). » L’extrait de son annonce, texte noir sur fond blanc, fait froid dans le dos. Que de colère et de lutte là-dedans… Un combat armé entre pseudonymes en colère, quel bourbier ça semblait être. Au-delà de ça, il montre une fois de plus qu’il faut avoir envie de monter sur scène. C’est un milieu où il faut tenir, garder l’envie. Et ce n’est pas n’importe qui qui l’affirme : Adrien Arnoux. Des décennies qu’il vient jouer partout, surtout en format court. On pense aussi à Arnaud Tsamère, dont les secrets pour perdurer sur scène fonctionnent à merveille !

La scène, le seul lieu pour évaluer un artiste ?

Je devrais me réjouir de voir un artiste se rendre compte du fossé entre Instagram et la scène. De manière plus malveillante encore, espérer qu’un de mes préférés reprenne le flambeau. Mais je suis un peu triste. Il semblait être plus qu’un influenceur ou un instagrammeur, appelez ça comme vous le souhaitez. La communication sur les réseaux sociaux, son pseudonyme initial… Le vrai souci, c’est que je n’ai jamais su à qui j’avais affaire. Seul le visionnage de plusieurs séances aurait pu me livrer des réponses. Je me réjouissais de décrypter le marketing, de comprendre qui avait tort ou raison. Mais tout n’est pas perdu : un arrêt n’est jamais définitif…

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