Yacine Belhousse à la Nouvelle Seine : une révolution ?

Juliette Follin 12/12/2017

Le spot du rire a été voir le spectacle de Yacine Belhousse, Révolutions. On voulait comprendre ce qui se cachait derrière les éloges assez unanimes entendues ici et là. Il reste 2 représentations vendredi et samedi soir.

Un dicton disait que quand on regarde Arte la nuit, on y voit la vérité. C’était un groupe Facebook, et ça faisait bien de le rejoindre à côté de celui sur le sarcasme. Quand tu es en première année de fac et que tu ne connais rien de la vie, ça te donne un genre. Mais quel rapport avec Yacine Belhousse, me direz-vous ? Le discours assez récurrent autour de lui, parmi les humoristes. En substance : c’est le meilleur d’entre nous. Ça fait bien d’aimer ce qu’il fait.

Alors, j’ai essayé de comprendre. Pourquoi des humoristes, qui ont vocation à être au meilleur de leur forme sur scène, vont-ils adouber avec tant de force l’un des leurs ? Et comment peuvent-ils dire que, malgré ça, le public a du mal à comprendre son génie ? Qu’il méconnaissait ce que le stand-up était à ses débuts ? Ne dit-on pas que si le public ne comprend pas, c’est comme un plat à la piscine ? Rien à faire : il fallait le voir par moi-même. Avant que ce discours dithyrambique vienne ruiner l’opinion que je pourrais m’en faire.

L’univers absurde de Yacine Belhousse : n’en ratez pas une miette !

Sur le papier, les voyants sont au vert. L’humour est absurde, voire anglais. Le voir en plateau d’humour m’avait plu. Pas enthousiasmé, mais m’avait suffisamment fait rire pour me dire que la place n’était pas volée. Là-bas, il est souvent présenté comme l’attraction. Cela pourrait mettre la pression, mais aujourd’hui, il doit être habitué.

Le spectacle commence. L’énergie est là, et rapidement, l’avertissement vient. Attention : vous allez saigner du nez si vous ne me suivez pas dans mon univers. De fait, je me dis que j’ai reçu assez d’avertissements comme ça à ce stade, je me dis que ça aurait pu être optionnel. Mais je ne suis pas quelqu’un qui découvre Yacine Belhousse. Je veux découvrir son style, sans explication de texte.

Je retrouve quelques passages vus en scène ouverte, je ne suis pas dépaysée. Mais, enfin, je saisis le style de Yacine. Des dialogues qui emmènent dans l’imagination de l’artiste. Il ne faut pas en perdre une miette sous peine de perdre complètement le fil. Dehors, c’est la nuit, le froid hivernal. Le chauffage de la Nouvelle Seine tourne à fond les ballons, les conditions sont réunies pour décrocher.

Bref, j’ai perdu le fil, parfois. Mais rassurez-vous : ce n’est pas grave. Les situations s’enchaînent, donc vous pouvez simplement reprendre le train à l’arrêt suivant. Ce n’est pas une envie d’être indulgent, juste une manière de dire : voilà, j’ai décroché, c’est ma faute. Suis-je contaminée par une indulgence belhoussienne ?

Verdict

On rit souvent très fort des tours de force dans le texte et l’interprétation. Parfois, on décroche car ce spectacle est perché. Pas comme j’en ai l’habitude, où je ne rencontre aucune difficulté de compréhension ou d’évasion. Or, si l’on accepte que cela fait partie du jeu, ça se passe bien. En revanche, je ne peux cautionner d’entendre que c’est le meilleur du game. Pas parce qu’il y a mieux, mais parce que ça n’a rien d’objectif. Quand un humoriste est bon, je pense qu’il est essentiel de savoir expliquer pourquoi on le pense. Comme dit cette semaine dans Sympa la vie, les gens qui ne sont pas connus font parfois plus rire que ceux dont les gens aiment parler. C’est à chacun de se faire une opinion.

Si je le trouve bon, c’est parce qu’il sait pousser ses situations imaginaires au bout. C’est parce qu’il va savoir surprendre et donner envie de se faire emmener loin de la salle du spectacle, du moment présent. D’oublier qu’on est sur son siège, dans un cadre précis, venu pour rire. Mais dans mon expérience de spectatrice, j’ai passé de bien meilleurs moments au spectacle. Parce que je cherche plus des choses dans l’introspection ou l’émotion.

En résumé : allez-y sans pression. Il y a très peu de mauvaises critiques sur les archives de Billetreduc. Et la majorité d’entre elles fustigent le fait qu’il ait été encensé, presque sur-vendu. Ne vous posez donc pas trop de questions, faites confiance à votre interlocuteur sur scène. Pour mémoire, personne n’a saigné du nez.

Crédits photo

© Betty Durieux : reportage à la Nouvelle Seine

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