L’école de la vie, le spectacle captivant d’Émilie Hamm

Juliette Follin 30/06/2021

Émilie Hamm a investi le théâtre de la Petite Loge pour une exceptionnelle en juin. Elle y jouait son nouveau spectacle, L’école de la vie. Hors de mes radars habituels, elle m’a pourtant convaincue de la découvrir…

Émilie Hamm : la première d’une artiste expérimentée

Que cache une description de spectacle ? Avec Émilie Hamm, la réponse ne coulait pas de source. Je n’avais même pas effectué de recherches sur internet, faisant confiance à ces quelques lignes et la Petite Loge. Je devinais un CV de comédienne bien fourni (c’est le cas), quelque chose qui allait changer des humoristes de plateau (toujours un grand oui).

Vous le savez, j’adore les balbutiements des débuts. Cependant, tout indiquait des mois de travail avant de proposer une œuvre qui donne déjà l’impression d’un aboutissement. Les professionnels de l’humour savent qu’une première est toujours un « travail en cours », mais pour le spectateur classique, les fondations sont déjà solides.

L’école de la vie : un drame poignant à la Petite Loge

Derrière ce titre, j’imaginais une pièce très enfantine, optimiste. Ma surprise était donc totale à la découverte du thème central : l’expérience d’un deuil parental bien trop tôt. Aude Alisque explorait déjà ce registre deux semaines plus tôt. Toujours une exceptionnelle, toujours à la Petite Loge. Hasard du calendrier ?

Si Aude Alisque y consacrait quelques minutes, Émilie Hamm construit toute son histoire autour de cet événement. Sa grande force ? Avec l’aide d’Aude Galliou à la mise en scène et l’écriture, elle propose une mise en scène immersive, à couper le souffle. Elle est d’une justesse immense, tant dans le propos que dans le jeu, les placements, la voix…

L’école de la vie est une œuvre complexe. Chaque pièce du puzzle semble éparpillée au début du spectacle, plongeant le spectateur dans une attention totale. Happé par la narration, il reste alerte tandis qu’Émilie Hamm assemble le résultat final entre drame et légèreté. La science, la NASA, les souvenirs d’enfance, les déplacements à travers le globe… Tous les sujets ont leur raison d’être.

Émilie Hamm : une comédienne de haut rang à l’écriture impeccable

J’oppose souvent les auteurs qui apprennent à jouer et les comédiens au texte plus faible. Émilie Hamm dispose des deux cordes à son arc et elle vise plus juste que n’importe quel tireur d’élite. L’histoire est prenante, difficile à encaisser. Pour autant, Émilie Hamm réussit à éviter l’écueil du pathos : elle ne tremble pas une seule fois, ne verse aucune larme et accompagne l’ensemble avec un optimisme à toute épreuve.

C’est saisissant de force, ça demande quelques temps pour reprendre ses esprits. Pour mieux comprendre, je vais vous situer L’école de la vie sur l’échelle comique. Il y a la bonhomie candide d’une Marina Rollman qui évoque la dépression. Également, il y a l’émotion d’une Marion Mezadorian qui développe sa galerie de personnages. Mais ce n’est pas tout : je rencontre une comédienne à la singularité déjà bien présente, qui ne peut finalement être comparée à personne.

En résumé

J’ai trouvé ce spectacle saisissant. Défini comme un one woman show, c’est bien davantage un seul-en-scène touchant et drôle. Touchant avant d’être drôle, car les pièces de ce type ne promettent pas un rire toutes les 15 secondes. Ça n’aurait pas de sens, ça dénaturerait le propos et la force de la proposition artistique.

Parfois, on souhaite rire à gorge déployée pour tout oublier, en toute légèreté. À d’autres moments, on cherche des spectacles qui font prendre de la distance sur la dureté de la vie, sur la capacité que chacun a en lui pour s’en sortir. Il fallait une porte de sortie positive, un message final qui accompagne et permet d’encaisser le drame tout juste conté. Il est bien au rendez-vous, profondément actuel et révélateur d’une société qui souffre, mais qui a toutes les armes pour se relever.

Depuis près d’un an et demi, Émilie Hamm devait jouer ce spectacle. Les confinements successifs décalaient ainsi l’échéance et permettaient une refonte totale du spectacle. Face à un gratin de professionnels qui ont suivi la création du spectacle (Clémence Bracq, Jessie Varin, Valentine Mabille…), elle a offert un spectacle remanié. Preuve s’il en est que les répétitions et la collaboration artistique peuvent aussi faire évoluer des spectacles sans tester des passages en plateau de stand-up.

Crédits photo

© Jody Carter

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