Dans le sud-est, l’émergence des comedy clubs

Fabien Tarabiscotto 19/01/2019

A Paris ces dernières années, les plateaux d’humour se sont multipliés comme des petits pains. Au point d’en avoir plusieurs chaque soir de la semaine. Alors même si on savoure, pour faire attention à l’indigestion le spot du rire est là pour vous guider.

Parmi les plus réputés, on retrouve le précurseur, à l’origine de la (re)naissance du stand-up en France : le Jamel Comedy Club. Véritable big-bang dans le milieu de l’humour dans l’hexagone, le JCC a permis son évolution, premièrement dans la galaxie parisienne, avant de s’étendre en province. Et c’est justement là-bas que je suis allé faire un tour. Loin des étoiles de la capitale, les talents brillent aussi.

La culture stand-up prend ses marques

Aussi, c’est il n’y a pas bien longtemps dans une galaxie pas très lointaine, à Marseille et Toulon, que je suis allé voir les deux plateaux d’humour co-méditerranéens. Vous remarquerez que mes jeux de mots n’ont rien à envier à ceux de Laurent Ruquier.

Devant la salle, on constate que le public est assez hétérogène. On remarque des personnes de tous âges : enfants et familles, jeunes et moins jeunes. Le contraste avec l’affluence de certains plateaux parisiens est saisissant. En province, l’esprit sketch et café-théâtre prédomine toujours un peu. Les gens sortent voir un « spectacle », ils ne vont pas voir du stand-up. Même si l’audience n’est pas toujours habituée à cet exercice de ce style, une fois la glace brisée, le talent fait effet et le rire vient volontiers. Même si parfois, on a l’impression que certains sujets restent moins faciles à aborder.

Dans la programmation des cafés-théâtres, les one-man-shows côtoient les pièces de théâtre, mais les stand-uppers font aussi leur trou. L’émergence des plateaux leur permet de se roder localement.

Lieu d’exposition pour les artistes…

Le comedy club de l’espace Kev-Adams

Si le comedy club parisien a bien poussé, son petit frère marseillais ne veut pas grandir trop vite. Il sait que rien ne sert de courir. En s’appropriant son public il a ainsi fait sa place dans le sud. Dans une rue sur le vieux port, au Quai du Rire, la petite salle de l’espace Kev Adams est souvent pleine. Le plateau formé il y a quelques années réunit chaque vendredi soir les artistes locaux qui ne se sont pas encore exilés sur la capitale.

Ainsi, dans un milieu où la culture sportive détient le monopole de l’exposition, le spectacle vivant se porte pourtant bien. Par ailleurs, on peut penser, à la vue des résultats de l’OM en ce moment, que les gens ont besoin de rire. Charge aux humoristes d’être plus drôle qu’une frappe de Mitroglou.

Le MC régulier est un produit local, son accent ne nous trompe pas. Maliko Bonito nous met tout de suite dans l’ambiance. Il joue d’ailleurs son spectacle le samedi soir au Quai du Rire. On le sent chez lui et il nous y emmène volontiers pour nous présenter la soirée.

Les artistes s’enchaînent, entre confirmés qui tutoient les plateaux parisiens et ceux qui peaufinent encore leur set. Ça teste, ça se rode. Et s’il arrive que le rythme baisse, ça reste bref et les gens sont conquis. L’ambiance est bonne et intimiste, la petite salle favorise l’interaction. Le public passe une bonne soirée. En résulte le remplissage de la salle chaque semaine.

Le Fada Comedy Club

Dans la région toulonnaise, la culture du spectacle vivant ne se porte pas trop mal. De nombreuses salles accueillent humoristes et comédiens en tout genre. Toutefois, depuis peu, la petite salle du zénith et le théâtre Le Colbert accueillent régulièrement des stand-uppers. Shirley Souagnon, David Azencot, Marina Cars ou Guillermo Guiz s’y sont ainsi produit récemment. Cependant, ces salles recevaient jusqu’à peu uniquement des artistes professionnels et confirmés.  Depuis, le premier plateau de l’aire toulonnaise a vu le jour.

A ce propos, il y a tout juste un an, on assistait à la création de la troupe du Fada Comedy Club. Orchestré par Jérémy Bacardi, organisateur de la soirée, l’événement mensuel est maintenant bien inscrit dans le paysage culturel local. Dans la salle de l’Oméga Live, 150 personnes se réunissent chaque mois pour ce plateau d’humour.

Dans une ambiance conviviale, le MC ouvre la soirée en nous annonçant les artistes présentés comme sa « famille ». Le ton est donné. En outre, la troupe est relativement fixe. Elle est exclusivement d’origine locale, bien que la plupart s’exercent maintenant sur Paris. On peut y voir de manière régulière Chrystelle Canals, Meddy Viardot, Marine Ella, Briac, Lyes Akroun. En plus des humoristes récurrents, on retrouve un invité et un spécial guest. Ainsi, Bun Hay Mean, Anthony Joubert ou Donel Jacksman ont récemment clôturé la soirée en soulevant la salle !

Finalement, les comédiens et spectateurs peuvent se réjouir de trouver de telles scènes en province. Si les humoristes ont le rêve parisien en tête, l’expansion des plateaux dans les régions peut permettre à ces derniers de se roder, voire de faire son trou localement.

…et d’animation culturelle pour le public !

Grâce aux comedy clubs, un nouvel événement s’immisce dans l’animation locale. Les plateaux de comédie qui se forment un peu partout loin de la capitale se substituent aux sorties cinéma. La touche de fraîcheur et de jeunesse du stand-up séduit toutes les générations. Un public d’habitués commence à s’y réunir. Et entre ceux qui découvrent la discipline et les plus familiers, le constat est le même : la soirée est une réussite.

Au-delà de la sortie régulière qu’il offre, ce type de plateau est un vrai boost pour le spectacle vivant. Les aficionados des vidéos YouTube goûtent à l’expérience en live, qui est toujours infiniment meilleure. Et les familiers des pièces de théâtre expérimentent la disparition du 4e mur. En famille, entre amis, tous le monde se presse. Force est de constater que le bouche à oreille a son effet pour remplir les salles.

Crédits photo

© Jean-Michel Elophe / FADA Comedy Club

A propos de l'auteur