Edinburgh Fringe Festival : du pur stand-up

Juliette Follin 19/08/2017

En août, le festival the Fringe célèbre sa 70e année à Edimbourg. Pour l’occasion, le spot du rire s’est donc déplacé en Ecosse pour vivre l’expérience de l’intérieur. Une rétrospective en deux volets, qui s’achève avec le meilleur : le stand-up au Fringe.

Le stand-up au Fringe : retour aux sources

Il est temps d’oublier le mal du pays, notamment provoqué par une nourriture trop grasse engloutie pendant le festival. La météo est bonne après tout, tâchons de ne pas oublier les écharpes et autres manteaux coupe-vent. Un concept essentiel à votre survie sur le territoire écossais en plein mois d’août !

“Don’t worry, be happy” avec le pessimiste Matt Duwell

Ainsi, le spot du rire a commencé et clôturé sa venue au Fringe avec du stand-up. Pour le premier spectacle, Matt Duwell explique comment devenir heureux en étant pessimiste. Une thématique assez courante et familière pour tous les publics de stand-up. C’est le seul spectacle qui a été vu par de nombreux non anglophones. Les anglophones ont donc davantage peuplé les autres spectacles, ou alors les langues étrangères ont su se planquer au bon moment.

Matt Duwell assure le job, on est simplement étonné d’assister à un happy ending. Sincèrement, aller voir du stand-up c’est aussi et surtout pour oublier ses problèmes… alors voir un mec heureux, qui fonctionne normalement sur scène, c’est étonnant !

Insécurité et stand-up au Fringe : une performance à cœur ouvert

Heureusement, Damien Power et Bobby Mair ont mis en lumière la théorie de Seb Mellia, qui considère que quelqu’un d’équilibré n’est pas drôle. Et ces deux-là étaient les deux seuls où je savais que j’allais passer un bon moment. Explications.

Damien Power : l’utopie, la société et la course au succès

Damien Power est le frère du pilote de course Will Power. On dit souvent que l’humour, c’est une grande famille… et c’est pareil pour les sports mécaniques. Donc Damien Power est de ma famille, par extension. Le spectacle montre qu’il est difficile de traverser cette période de changements technologiques, sociaux, écologiques sans se sentir un peu perdu. Même pour son frère Will, qui explique que le succès c’est d’éprouver du bonheur en étant avec les siens. Jugez plutôt dans la vidéo ci-dessous. Ce n’est pas exactement le même sketch, mais on retrouve l’idée principale !

Heureusement, le spectacle est beaucoup moins pompeux qu’un plaidoyer pour sauver la planète. Par exemple, il y a du cru. Une situation m’a beaucoup fait rire : apparemment, une bestiole l’a empêché de passer un bon moment avec une fille. Malheureusement, je n’ai pas compris de quel animal il s’agissait. Le mot était répété en boucle, je n’avais aucune idée de l’espèce désignée et donc je ne visualisais pas la scène. Heureusement, j’ai compris l’essentiel.

Bobby Mair : un tutoriel infaillible pour toucher son public

Le spectacle Loudly insecure de Bobby Mair est le spectacle le plus à la limite que j’ai vu. C’est aussi le dernier qui m’a permis de repartir d’Ecosse avec sérénité. Il faut dire que Bobby Mair est parti avec plusieurs avantages :

  • C’est un enfant adopté, comme moi. L’identification est garantie dès la naissance. C’est comme un mariage mixte, spectateur-public. Partie trop loin ? Peut-être. Passons.
  • Je l’ai découvert à Londres par hasard, en avril dernier, dans un spectacle que je ne devais pas voir. Le précédent ayant été annulé, j’ai donc fini dans cette salle. J’avais passé une semaine là-bas pour découvrir le stand-up anglophone, et c’est déjà le seul type qui m’avait vraiment plu.

Bref, Bobby Mair avait déjà assuré. Je ne sais pas s’il l’a ressenti, parce qu’il a commencé son spectacle avec une posture quasiment anti-sociale. Il s’amuse ainsi à choquer en disant qu’il se moque que le train reparte, après 3 heures d’attente, avec un accident grave de voyageur… et d’autres situations où la partie la plus sombre des hommes ressort de temps en temps. Laisser sa place dans les transports, se faire passer pour un éclopé de la vie avec un chien à 3 pattes dont il aurait mangé la patte manquante… De l’autre côté, il développe une facette plus triste, davantage axée sur la vulnérabilité et l’insécurité.

Immersion : vivez le spectacle Loudly insecure comme si vous y étiez !

Les interactions avec le public commencent, et là, le retournement de situation est pour moi. Voici une retranscription de ce qu’il s’est passé. Les expressions peuvent avoir été changées ou raccourcies pour la compréhension, et parce que je n’ai pas enregistré la conversation.

Bobby: “Is there an accent?”

Le spot du rire: “I’m French.”

Bobby: “From…?”

LSDR: “France.”

Bobby: “Don’t laugh, she could be French from African countries or Belgium! So what do you do for a living?”

LSDR: “Instructional designer. I build online courses.”

Bobby: “For whom?”

LSDR: “Companies in healthcare, education.”

Bobby: “What a good person you are. I tell you what, if this place is on fire, I would let everyone die in the flames and save you. There’s got to be no better occupation than that, right? Does anyone have a better occupation?”

Guy in the second row: “I’m a lawyer.”

Bobby: “What kind of lawyer?”

Guy: “For banking.”

Au final, l’avocat qui a suscité l’hilarité de la salle est parti en milieu de spectacle, après avoir bavardé et pratiqué la discipline du heckling au grand dam des personnes qui appréciaient le moment. Pendant ce temps là, le spot du rire est conquis pour au moins cinq ans. Bobby a de la chance de ne pas jouer en France, le spot du rire pourrait le suivre partout.

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